L'ENTRESORT

- C'est quelque chose que tu as mangé Elle tient mes cheveux d'une main, tapote distraitement mon dos tandis que je vomis dans les toilettes. - C'est quelque chose qui ne passe pas. C'est si souvent ma tête dans les toilettes, à genoux devant la faïence, les haut-le-cœur et les brûlures tout le long de mon corps de six ans. -C'est encore une crise de foie. Et elle tient mal mes cheveux, des mèches collées de vomi s'accrochent à mes joues et mon estomac n'en finit pas, des années durant, de se vider de l'enfance. Work, Virginia Echeverria Whipple , 2010 (?)

Elle se réjouit d'un rien - tout est si fragile. Hackney Flowers , Stephen Gill , 2010 (?)

Je ne suis pas venue te voir je suis venue te décevoir. Je ne suis pas venue pour que tu m'approches je suis venue pour que tu me reproches. Je ne suis pas venue pour exister je suis venue persister.   Sans titre , Jannis Kounellis , 1983

Elle ne savait pas que la journée se souciait d'elle, qu'elle lui offrait, avec les sourires et les exclamations des inconnus, avec la lumière chaude du ciel de printemps, de quoi affronter, le soir, la blessure du déni, le gouffre de l'abandon. Sans titre , Marcelline Delbecq , 2006

Contrebasse en fourreau blanc, femme tronc déposée sur le parquet, planches de bois vernies et piétinées, boule à facettes et nuit artificielle. Trois marches sang de bœuf The Band - musiciens écaillés sous perfusion de nuit artificielle. Metro slop , Sundry Sullen , 2008

Feindre l'enfance /en peau de peur /et sourires faux /en naïveté décimée /et mots anonymes.

Ils ont fait de moi une poupée de ventriloque la main enfoncée de l'anus jusqu'à la bouche leurs doigts écartent mes dents - ils me font dire leurs mots, leurs mensonges leurs fautes, leur honte. A Loss for Words , Erin TheArtist , 2011

Elle louve, prête à mourir lape le lait de la fureur paquets de poils collés canines dénudées. Elle louve mante chienne, gronde - n'approchez pas. 2011, Specimen portrait banners , Julian Montague

  Et puis je les ai vues les 5 affilées les filets les 5 fantômes les rets les monstres blancs - corps flottants - le réseau le silence de leur absence les arcanes noires de la mémoire d'où elles surgissent sans un mouvement l'impossibilité d'avancer les corps armés - cinq pas en avant l'armée des 5 la folie du souvenir comment se déplacer ? comment s'en dépêtrer? creuser des galeries, s'enfoncer plus obscur. Je n'ai pas envie  de les quitter je sais - je suis là depuis longtemps déjà. Home of memory , Chiharu Shiota , 2011

Cela faisait longtemps déjà que cette maison était entrée en maladie, qu'on ne parlait plus qu'en murmures, qu'on fermait les portes derrière chaque dos, que les rideaux alourdis ne s'écartaient plus, que les appareils médicaux s'étaient imposés dans la décoration, que la colère, le découragement, les larmes, les espoirs minuscules jouaient leur partie. After the dream , Chiharu Shiota , 2011

La jouissance honnête de la contemplation. La jouissance malhonnête de l'action. The Pendant , Michaël Borremans , 2009

Si timide qu'elle n'ose enfoncer deux fois son doigt sur la sonnette. Si pudique qu'elle reste derrière la porte, inquiète et pleine d'espoir. Si polie qu'elle n'écoute pas si de l'autre côté, un bruit pourrait soulager son attente. Si désarmée qu'à la nuit arrivée, qu'elle renonce à se battre contre la porte fermée. Si dépareillée qu'elle s'écarte silencieusement et ne reviendra plus. Untitled , George Holz , 2010 (?)

Il est, triomphant, assis sur le ventre du petit. Il trône sur le vaincu savoure son avance. Ils ont sept et dix ans. Et depuis les années et le poids sur le ventre, le pincement, le brusque étouffement dont il faut se libérer; une apnée yeux brouillés - vaincue à coups de pieds. It's nice that , Nora Korn & Christoph Köhler , 2011

Alors c'est toi l'inventeur du Je  de ce combat de loups canines, babines, salive, face-à-face, yeux jaunes, demi-visage derrière le masque noir. Ryota Nakajima as Mannojo , Hiroshi Watanabe , 2005

Continuez à coudre consciencieusement la capuche qui couvre votre visage. Untitled , Federico Guida , 2009 (?)

Au pied. Assis. Couché. Écarte. Main sur la bouche, doigts sur la gorge, langue raidie, salive aux commissures, oreilles qui bourdonnent. Et dans le bas du ventre, les deux trous, les assauts, l’herbe dorée. Entre les orteils, la douceur et la fraîcheur de la vague. Le sable. Dans la bouche. Mâche bien. Ça crisse. Recrache. Lorsque nous serons, à bout de souffle, assis sur les bords, les jambes pendantes. Côte à côte.   Four pears , Olivia Parker , 1979