derrière

 

plq, rosso, 2021

Entrer dans les appartements je pourrais m’y déplacer les yeux fermés, c’est toujours la même tristesse qui carillonne en beauté, les meubles lourds et marrons les canapés engloutis dans les murs les photos des enfants sages bordées de carton la toile cirée et l’odeur du modeste, à chaque fois j’en prends plein les narines l’odeur du modeste est partout sur moi elle joue au boomerang c’est d’ici que je viens

Après les premières minutes assise du bout des fesses sur le plastique le cahier sorti le stylo en berne, les premiers mots qui se rencontrent me fera-t-on confiance, je suis qui ? cette inconnue dans votre salon sur le bout de votre table qui vient simplement écouter pour écrire ensuite. Tout le monde a envie de parler, moi j’ai juste envie d’écrire jamais de parler, donc ça tombe bien, au bon endroit dans ces salons de toute éternité, la chaleur se répand, on me sort les albums les coupures de journaux le café et puis les mots

La première demi-heure écoulée le rideau de fer s’ouvre définitivement et l’histoire intime déboule, sans crier gare, jamais, « je vous le dis à vous, je n’en parle à personne », et la souffrance jaillit, rien de modeste celle-là, on pourrait l’écrire en majuscule, elle est toujours énorme impensable, la camion qui a percuté ta vie et qui t’ai laissé définitivement handicapé dans ton appartement-refuge, alors tu ouvres mieux les yeux, tu frottes tes paupières et repasses les photos au ralenti lorsque le malheur n’était pas encore au milieu de la table dans la marmite, lorsque les sourires ouvraient les visages de haut en bas de droite à gauche

Il n’y a plus que des cicatrices. Et la pudeur du malheur des malheureux. Qui change le dur en solidarité ; l’indicible en rires.

















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