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Affichage des articles du décembre, 2014

ALIX

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Isabelle Vaillant , Perrine et Alix, décembre 2014 Alix, le double, son miroir. Je du miroir où nous nous reflétons. Dédoublement réciproque. Si l’intime est le moi est la photographie, nécessité de montrer le procédé. Il devient la trace de la main du geste. Il devient la courbe de la vue le clignement de l’œil. La pellicule, ses bords noirs d’éternité. L’image cernée, faire-part du deuil. La frise de flèches et de chiffres avancent le temps ; marqueurs de réalité ils lestent, retiennent dans ce monde. Les crans L’écran SAFETY Signifiants Sur un même tirage, Jean Eustache double Eustache, deux fois l’homme, deux fois plus. La frontière entre deux soi, entre deux images, pas plus épaisse qu’un miroir, que la tranche aiguisée d’une pensée. Chaussures, vêture, enveloppe, double lecture, voir les objets, comprendre l’histoire, cerner et discerner. Souvent l’aura laisse flotter le sujet, son fragment. Dans un même mouvement, apparaître et disparaître, s’approcher se recul

Une nappe blanche

Main tendue devant l’entrée du métro. Froid. Froid jusqu’au glacial. Sa main froide sans doute, jusqu’au glacée. Dans les escaliers dévale le peuple; il parle : « On dit qu’il mange sur une nappe blanche. Alors je ne lui donne plus. Une nappe blanche ! On l’a vu. On aura tout vu ! Plusieurs l’ont vu. » Scandale chuchoté devant la main tendue. Cascade grêle de mots vers les rames à embarquer. Qu’il mange d’accord. Et une et deux et trois piécettes. Mais sur une nappe? Qu’il mange d’accord, mais sur une nappe blanche, non. Qu’il mange d’accord. Sur une rouge une marron, une toile cirée, ou mieux sur une table crasseuse.  Qu’il mange d’accord, dans les règles, sans table, sur ses genoux, accroupi comme une bête. Qu’il mange d’accord mais interdiction après avoir tendu la main de 7 heures à 19 heures, avec la pluie la neige, de manger sur une nappe blanche. La pauvreté doit respecter ses codes. La générosité ses limites. On donne pour un os à ronger une conscience à sou

La mine

La mine du mot où je Descends visage couvert le canari point jaune à l’avant Creuser piocher crever Le tunnel où je rampe de tout mon long exercice physique coudes genoux flancs Arracher vêtements et peaux ; inutiles La pierre de la langue je creuse le mot-matériau dur compact dense ; excaver Mot charbon, mot craie, mot pierre Tous les jours je descends m’épuise m’y tue ; pour rien presque rien sauf les blessures les accidents ; rien presque rien sauf Soudain La pépite l’éclat Le salaire

Départ

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plq, Départ, 2014

L'ogresse

Je suis l’ogresse qui ne parvient plus à voir la chair écrire la chair manger la chair Une suture une blessure une coupure Je me détourne et tout ensemble les yeux le crayon les sens Je bafouille perds le contrôle C’est l’éclipse d’une vie sombre lentement éclairée C’est la cicatrisation de corps dévorés lentement refermés C’est la coagulation de veines perforées lentement épargnées Je suis l’ogresse au ventre vide peau vide lit vide Même le regard si j’abandonne Même la tête si j’abandonne Sans intention de donner la mort je poursuis ma vie, à coups de crayon à coups de tête prise de bec prise de position j’ai toujours à dire mais plus d’appétit Pour la chair de l’autre Ce goût Me dégoûte Ces promesses Blessent Les serments les jugements les assaisonnements de la chair crue Balayer la table d’un ample mouvement du bras je ne marche pas sur les tessons des histoires passées

peupler

Le problème avec les corps organisés Les corps renfermés Le problème avec les corps embaumés Les substances introduites Les organes ambulants C’est la difficulté à peupler C’est si dangereux les êtres organisés Les têtes adaptées Dans l’intérêt des sages Des légitimes Des nécessaires Interdire l’accès des vivants aux morts

Mathématiques

Les kilos de visages chaque jour croisés Le poids des doubles des empêchés Les exercices de cruautés Les larmes d’argent Les mots dignes de pitié, les morts dignes de piété S’agitent étrangement sous le ciel Horizontalement la géographie Verticalement l’histoire Profondément la géologie Absolument le récit