L'abito di Versino
Devant moi en quatre morceaux
Je te reconstruis te reconstitue te
rhabille Versino et le chapeau n’est pas dans la vitrine
J’approche mes narines d’une fente
entre deux verres je voudrais te respirer.
En quatre morceaux pantalon manteau
tunique et chaussures manque ton chapeau Versino
l’abito di Versino.
Précoce démence tu as pensé à tout au
pantalon au manteau à la tunique aux chaussures
Et l’écharpe
Quarante-trois kilos de purification
que tu endosses
« Il peso di questo vestito è di kg 43 e l’ammalato ben raramente,
estate e inverno, si astiene d’all indossarlo »
Dans lesquelles tu te coules. Tu
coules.
Chaque jour tu nettoies les sols de
l’asile puis lave les serpillières puis les défiles puis formes des cordons
pour tisser tes vêtements ton rituel ta peau.
Démence précoce tu t’es préparé
gigantesque devant moi en quatre morceaux, de combien de morceaux as-tu besoin
pour être réuni en un seul et unique ?
Tu tisses l’habit tant grand tant
élégant avec aux poignets au cou des cordons des ajouts des poches, tu doubles
la ceinture rayée ourles le haut du pantalon de reliefs de mystères de larmes.
Sur la photographie de toi ton visage
caché sous le chapeau et dans le col, tes mains dans les poches tu ne donnes
pas beaucoup à voir dans ton habit-monument un pied légèrement en avant tu
poses statique protégé devant le mur de l’asile précoce.
Tous les jours et les fils de tous
les jours que tu dénoues renoues – as-tu reçu un baiser de ton père
aujourd’hui ? – lavés transformés glissés entremêlés avec les autres, les
autres jours – as-tu reçu un baiser de ta mère aujourd’hui ? – tissent ta
tanière ton monde à toi Versino le Précoce peux-tu seulement bouger dans cette
armure blanche comme un squelette veiné de bleu et ce rouge au cou aux poignets
comme tranchés cou et poignets les perles de sang toutes retenues pas mes
larmes accompagnent tes gestes lorsque tu revêts revis lorsque te voilà si
grand été comme hiver l’histoire de ton pays dessinée sur les reliefs de
l’habit, l’abito di Versino.
Et ta tête flamboie saignant
toujours, mettant des fils de pourpre sombre au bord de ton cou au plié de tes
mains – as-tu reçu un baiser de ton père aujourd’hui ? –
Si à mon tour j’entrais dans ton
habit – il est à ma taille je crois – alors sans doute serais-je absolument
protégée absolument purifiée absolument isolée absolument maîtresse de mon
monde.
Roi Roi tu es Roi je le vois dans la
bande de tissu dont tu pares l’entrée des poches ventrale et du pantalon – dans
le rythme parfait des apparitions de fils bleu de fils marron, dans la
multitude des cordons qui lacent tes bottes dans la carrure la stature dans le
maintien de ces liens de serpillières élevés à la plus céleste des matières où
ta peau se coule si parfaitement si précisément si pesamment.
Où tu te reprends.
Où tu règnes.
– As-tu reçu un baiser de tes parents
aujourd’hui ? –
L'habit de Versino est conservé dans la collection Lombroso à Torino